La qualité des liens entre parents et professionnels : clé d’un accompagnement adéquat de l’enfant dans son développement ?

Auteur(s)

  • F. Molénat

Référence

Molénat, F. (2013). La qualité des liens entre parents et professionnels : clé d’un accompagnement adéquat de l’enfant dans son développement ? Contraste, 1(37), 185–207.

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Résumé de l'auteur

Un bref survol des quatre décennies passées indique la puissance des changements dans les modalités de communication entre parents et professionnels autour de l’enfant vulnérable. En même temps, une telle vision historique donne du sens aux efforts actuels des équipes de soin. Les plus anciens d’entre nous se souviennent de la déréliction dans laquelle sombraient de nombreuses familles autour d’un enfant atteint d’un trouble du développement d’origine biologique ou acquis. L’identification tardive du problème suscitait des réponses thérapeutiques peu diversifiées, dans une collaboration avec les parents réduite ou inadéquate. Le cloisonnement quasi total entre les acteurs, depuis la grossesse jusqu’à la confirmation diagnostique chez l’enfant et sa « prise en charge », entravait ce que l’on appelle de nos jours « l’alliance » avec les parents. Malentendus, ruptures de soins, séparations pathogènes compliquaient le tableau, sans qu’une conscience précise de ces aléas puisse se faire jour aisément. Les conflits entre parents et professionnels s’interprétaient plutôt du côté de supposés dysfonctionnements parentaux, l’abandon des soins comme une « absence de demande ». Ainsi, l’enfant pouvait se trouver privé, dans la construction de son identité, des formidables ressources parentales non reconnues par les équipes techniques.

Commentaire du Centre Ressources

Cette contribution, écrite par une pédopsychiatre, souligne l'évolution depuis 40 ans des modalités de communication entre parents d'enfants en situation de handicap et professionnels. La collaboration était alors réduite ou inadéquate, le cloisonnement entre les différents acteurs impliqués pratiquement total, les conflits fréquents et expliqués par des dysfonctionnements parentaux, bref, les parents n'apparaissaient pas comme des ressources importantes pour les équipes techniques. L'anticipation, la coordination et le décloisonnement ont progressivement permis une prise de conscience des écarts entre les représentations de chacun, d’une part, et des systèmes de défense parentaux à l'œuvre face à leur propre bouleversement émotionnel non contenu par un environnement cohérent, d’autre part. Ainsi, à l’heure actuelle, l’enseignement mutuel parents/professionnels est reconnu comme nécessaire à l’équilibre de la dynamique environnementale autour de l’enfant vulnérable.
Tout l’intérêt de cette publication, basée sur une expérience de terrain, réside sur la démonstration que l'état d'esprit des équipes d'intervention, les freins institutionnels, mais aussi la diversité des structures de soin ou d'accueil à chaque étape de la vie de l'enfant et la discontinuité de son suivi, participent à l’augmentation de la souffrance des parents, et par-là, à la difficulté de leur partenariat avec les professionnels, malgré la reconnaissance, tardive mais réelle, des apports pour l’enfant et l’ensemble des acteurs de cette collaboration.
Les propos sont appuyés sur des recherches scientifiques s'inspirant de la théorie de l'attachement ou encore de la compréhension collective des divers registres de l'identité parentale, du deuil périnatal, de la reconnaissance des émotions parentales par les tiers présents, ou encore des travaux sur la triade de l’école de Lausanne avec la notion d'alliance familiale autour du nourrisson comme contexte d'apprentissage social pour lui, etc. Ils indiquent comment les professionnels peuvent soulager, par leur accompagnement et leur écoute, les parents en besoin de sécurité émotionnelle, d’attention et de bientraitance. C’est, par ailleurs, par l’acquisition de points de repère collectifs dans l’environnement professionnel que sera favorisé l’engagement créatif de chaque intervenant. A côté de l'alliance professionnels-parents, celle qui unit les professionnels entre eux, permet à chacun de trouver sa place et de travailler ensemble dans le respect de l'altérité. Les parents se nourrissent, selon l’auteure, du tissu humain les entourant et peuvent lâcher prise sans se sentir eux-mêmes lâchés, à condition qu’un suivi mis en place le plus tôt possible autorise une continuité et une convergence des avis sur le suivi de l’enfant. Ce lien est fragile et un jugement, par exemple sur un lien possible entre les difficultés de l’enfant et un dysfonctionnement éducatif parental, pourrait facilement le rompre en renforçant les défenses parentales.
Cette publication est intéressante car elle ne se contente pas de faire un constat, mais propose des outils pour assurer la continuité du lien parents-professionnels. Par exemple, il lui semble important d’aborder, à chaque étape de prise en charge de l’enfant en situation de handicap, l’histoire du lien avec les intervenants précédents, dans un grand respect mutuel entre professionnels, afin de repérer les blocages, les décalages, les malentendus et les émotions figées, et de permettre au partenariat de reprendre.

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