Créés en 2005, les Groupes d'Entraide Mutuelle (GEM) sont des associations des personnes ayant pour objectif de favoriser des temps de rencontre, de créer du lien, rompre l’isolement et favoriser le lien social sur un mode de fonctionnement fondé sur une co-construction par ses membres.

Si le projet citoyen est important, cet objectif ambitieux nécessite des ressources humaines et financières suffisantes et stables, une ossature éthique, des pratiques professionnelles partagées et réfléchies ainsi qu’une réflexion continue des acteurs des GEM pour évaluer la mise en œuvre de cet objectif.

En 2020, la crise sanitaire a mis à mal le fonctionnement des GEM, obligeant adhérents, administrateurs, animateurs, coordinateurs et structures d’appuis à se réinventer. Son caractère inattendu et brutal a également soulevé le voile sur toute une série d’impensés dans le fonctionnement des GEM.

Ces impensés ont fait l’objet d’une recherche d’envergure, « Le pouvoir d’agir des GEM à l’épreuve de la crise sanitaire », pilotée par le FNIGEM (ex-CNIGEM) et menée en partenariat avec trois sociologues. Cette recherche, a permis d’établir des constats, de les analyser et de faire émerger des recommandations pratiques pour chacun d’eux.  

Cinq champs d’action ont ainsi émergé et ont été collectivement discutés par tous les acteurs des GEM pour en saisir les enjeux et permettre, in fine, d’avancer vers un objectif d’autonomie et de co-construction :

  • Les ressources multiples et fragiles à disposition au sein des GEM
  • Les rôles, statuts et fonctions des salariés
  • Les relations avec les structures gestionnaires
  • Les relations avec les parrains
  • Les relations avec la ville

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LEVER LE VOILE SUR LES IMPENSES DES GEM

La recherche « Le pouvoir d’agir des GEM » a permis de mettre en lumière les impensés dans le fonctionnement des GEM.

Les impensés, concernent tous les sujets qui, sciemment ou non, n’ont pas fait l’objet de règles claires ; et dont il a été présumé que la pratique suffirait à en établir une sorte de résolution tacite. Or ces sujets sont cruciaux.  Ils doivent à la fois être visibilisés et faire l’objet de discussions entre tous les acteurs des GEM afin d’y apporter des réponses concrètes. 

Chacun de ces impensés est présenté ci-dessous. Pour chacun d’eux, vous pourrez accéder à une introduction, une vidéo pédagogique présentant les enjeux et la manière dont cet impensés s’incarne au sein des GEM, ainsi qu’une série de recommandations établie dans le cadre de la recherche « Le pouvoir d’agir des GEM ».
 

Les ressources multiples et fragiles au sein des GEM

Un certain nombre de GEM fonctionnent en collégialité, avec des vice-présidents qui peuvent éventuellement suppléer un administrateur ou un adhérent en souffrance. 

Mais dans ce contexte de raréfaction des ressources internes, l’objectif de « co-construction par les membres des décisions relatives au GEM » est plus problématique, dans un environnement social anxiogène et avec l’arrivée de nouveaux adhérents qui découvrent la vie associative, notamment s’ils ont un parcours institutionnel qui n’a pas favorisé le libre arbitre et l’autodétermination. 

Les membres du GEM n’ont plus ni le temps ni les ressources pour réfléchir avec d’autres GEM de proximité à de bonnes pratiques ou des pratiques ajustées au contexte, notamment lorsqu’ils sont de plus en plus sollicités par des réunions territoriales. Le travail de réflexion et de soutien intergems n’est pas envisageable faute de temps et de moyens. 
 
Les recommandations formulées concernant les ressources multiples et fragiles au sein des GEM sont les suivantes : 
  • Inscrire dans le cahier des charges la création de dispositifs territoriaux d’intergems permettant de soutenir le travail de réflexion partagée et continue sur les règles de fonctionnement, les postures et positionnement des différents acteurs entre eux ;
  • Développer les supports numériques, notamment pour les personnes avec des difficultés relationnelles et interactives et/ou éloignées géographiquement ; 
  • Organiser des formations pour les nouveaux adhérents sur la vie associative ; 
  • Soutenir le travail en collégialité ; 
  • Mettre en place des formations de pair-aidance et des recherches participatives dans le cadre de communautés mixtes de recherche


Les rôles, statuts et fonctions des salariés

Les salariés des GEM se reconnaissent dans une double logique de « coordination » et « d’animation ». Cette double fonction est problématique lorsqu’il n’y a qu’un seul salarié au sein du GEM, tant pour le salarié que pour les adhérents.

De plus, une charge mentale importante caractérise cette double fonction :

  • Dans la fonction « coordination », les salariés notent notamment le travail et l’attention sur l’équilibre du budget (quelle que soit les modalités de gestion du GEM), et sur le temps d’accompagnement pour développer les compétences et savoir-faire des administrateurs sur les questions en lien avec la gestion financière et la vie associative ;
  • Dans la fonction « animation », les salariés insistent surtout sur la disponibilité, sur la charge mentale et les «taches fantômes».

Les variations des capacités des adhérents supposent également de pouvoir compenser temporairement le déficit capacitaire tout en ajustant les activités, et à travers une posture en permanence « mouvante » adaptée à chaque personne et à chaque moment de vie du GEM.

Un des points clés issu de la recherche « Le pouvoir d’agir des GEM » est de professionnaliser, c’est-à-dire définir les compétences nécessaires pour occuper le poste d’animateur ou coordinateur de GEM. Il ne s’agit pas ici d’institutionnaliser, mais de définir un cadre de travail partagé définissant la place et le rôle de chacun des acteurs des GEM, les tâches particulières auxquelles seront confrontés les salarié et les compétences requises mais aussi les limites du poste.

Les recommandations formulées concernant les rôles, statuts et fonctions des salariés dans le cadre de la recherche « Le pouvoir d’agir des GEM » sont les suivantes : 
  • Inscrire dans les missions des dispositifs territoriaux inter GEM l’analyse des pratiques professionnelles en GEM, avec les acteurs concernés ; 
  • Permettre aux salariés d’anticiper les insuffisances capacitaires au sein du GEM et de pouvoir faire appel à l’instance territoriale inter GEM, et notamment à un pool de Co-évaluation des situations, d’appui, de régulation et de renforcement transitoire et négocié de moyens humains ; 
  • Associer des universités au travail de professionnalisation des intervenants afin de co-construire une éthique professionnelle commune avec les acteurs des GEM ; 
  • Organiser une conférence de consensus sur le « travail avec » dans les GEM, qui pourrait statuer à la fois sur les compétences nécessaires, les principes éthiques et déontologiques que suppose le travail d’animateur/coordinateur ;
  • Mettre en place des formations, en collaboration avec les universités (DU, Master) qui associent savoir, savoir-faire et savoir-être, approches systémiques et compétences pratiques, et s’appuyant sur les recommandations de la conférence de consensus ; 
  • Proposer un cursus de Validation des Acquis et de l’Expérience (VAE) pour ces formations ; 
  • Réfléchir à l’appellation des différentes fonctions au sein des GEM et articuler les compétences exercées avec une grille des salaires transversale aux conventions collectives ; 
  • Mettre en place des recherches participatives (adhérents-salariés-chercheurs) dans le cadre de Communautés Mixtes de Recherche


Les relations avec les parrains et les structures gestionnaires

Les GEM reposent sur une structure associative et reçoivent l’appui d’autres acteurs.

Les GEM doivent notamment recevoir l’appui d’un parrain pour être conventionnés et financés. Les parrains sont des organisations morales dont le rôle est de veiller au fonctionnement du GEM. 
Les relations des GEM avec leurs parrains sont variables. Certains parrains semblent très absents ou distants, malgré leur rôle crucial, tandis que d’autres sont plus soutenant. 

Les GEM peuvent aussi faire appel à une structure gestionnaire pour assurer un appui concernant la gestion salariale, se traduisant souvent par un prêt de main d’œuvre. Dans ce cas de figure, le salarié mis à disposition n’a pas de contrat officiel et direct avec le GEM, mais avec l’organisation gestionnaire. L’enquête par questionnaire réalisée dans le cadre de la recherche a mis en lumière des difficultés ou des tensions dans 25% des cas. Les désaccords peuvent concernant la gestion globale du budget du GEM, des informations sur les affections des ressources et des dépenses ou encore la gestion du personnel. Si le modèle de convention avec une structure gestionnaire donne quelques indications sur la contractualisation, elle ne définit ni ce qu’est précisément une délégation de gestion, ni ce que signifie la « mise à disposition » des salariés « embauchés pour le GEM ». 

Un certain décalage culturel a également été mis en avant, entre les adhérents, salariés des GEM et certains gestionnaires du médico-social habitués à gérer des établissements et services spécialisés. Ce décalage s’exprime parfois par un manque de compréhension des mécanismes démocratiques du GEM par le gestionnaire qui a plutôt tendance à gérer le GEM comme il gère ses autres services. 

Certains salariés ont aussi évoqué le fait qu’ils ressentaient parfois fortement ce décalage culturel entre le fonctionnement habituel de la structure gestionnaire et les spécificités démocratiques et participatives des GEM. Les zones d’ombres et nombreux impensés dans ce domaine accentuent ce phénomène. 

La fonction des salariés d’un GEM est de transmettre, soutenir et étayer des capacités d’expression, de communication et de libre arbitre, au niveau individuel et collectif, facilitant l’autodétermination des adhérents. Cet espace de travail qu’est le GEM ne répond pas aux mêmes logiques, protocoles, pratiques et postures professionnelles que ceux des espaces de travail des services médico sociaux. La délégation de gestion mérite donc d’être repensée en mission d’appui temporaire, pour soutenir et développer les compétences des administrateurs, en cohérence avec les missions des salariés mis à dispositifs et avec l’action des autres acteurs soutenant les expériences citoyennes des adhérents (bénévoles, parrains, associations locales, municipalités, etc.). 
 
Dans le cadre de la recherche « Le pouvoir d’agir des GEM » les recommandations suivantes ont été formulées concernant les relations avec les parrains et les structures gestionnaires : 
  • Réfléchir à et actualiser la place et le rôle du parrain dans l’organisation, la mise en place et l’accompagnement des GEM ;
  • Analyser la mise en œuvre et l’évolution du dispositif territorial inter GEM et reconsidérer éventuellement l’utilité du parrain au regard de la montée en compétences des inter GEM et des besoins des GEM ;
  • Redéfinir la mission d’appui apporté au GEM en formalisant un guide des bonnes pratiques des structures assurant cette mission, en associant la Haute Autorité de Santé ; 
  • Définir ou redéfinir ce qu’est le « recrutement d’un salarié pour un GEM dans un cadre administratif et règlementaire cohérent entre le GEM, la structure gestionnaire assurant la mission employeur et le salarié mis à disposition.
 

Les relations avec la ville

Les relations avec la mairie dépendant des relations qui ont pu se nouer (ou se dénouer) avec la municipalité et les services municipaux ainsi que les acteurs associatifs. Cependant, les possibilités de coopération, de conventionnement et de partenariat sont multiples. Outre la mise à disposition des locaux, les GEM peuvent participer à la politique locale de santé, au CLSM quand ils existant, peuvent utiliser les services communaux de droit commun concernant le logement, l’insertion professionnelles, etc. 

Les GEM tissent également des liens avec de nombreux autres acteurs du tissu local, associations, artistes, grand public, et s’inscrivent au cœur du lien social. 

Les recommandations formulées concernant les relations avec la ville dans le cadre de la recherche « Le pouvoir d’agir des GEM » sont les suivantes :

  • Mettre en œuvre une campagne nationale de sensibilisation des communes à la question de la santé mentale de leurs habitants
  • Développer de nouvelles formes de relations avec la ville (emploi, logement, transports, …)
  • Proposer à l’Association des Maires de France de siéger au Comité de pilotage de suivi des GEM

ACCEDER A LA SYNTHESE COMPLETE DE LA RECHERCHE "LE POUVOIR D'AGIR DES GEM"

Le pouvoir d'agir des GEM à l'épreuve de la crise sanitaire

Ce document est la synhtèse produite dans le cadre de la recherche "Le pouvoir d'agir des GEM à l'épreuve de la crise sanitaire". Ce document présente la méthodologie employée lors de la recherche ainsi que les 5 champs d'actions et recommandations associées. 

Présentation du rapport final

Ce document est une présentation détaillée du rapport complet de la recherche "Le pouvoir d'agir des GEM".

Présentation simplifiée

Ce document est une présentation simplifiée présentant la recherche "Le pouvoir d'agir des GEM".

LE POUVOIR D'AGIR DES GEM : UNE RECHERCHE PARTICIPATIVE TOURNEE VERS L'ACTION

La recherche "Le pouvoir d'agir des GEM" a été portée par le Collectif National Inter GEM (CNIGEM).
L'équipe était constituée de : 

  • Pierrick Le Loeuff, Délégué général du CNIGEM
  • Jean-Yves Barreyre, Sociologue, chercheur associé au laboratoire ARENES
  • Patricia Fiacre, Sociologue, Conseillère technique au CREAI de Nouvelle Aquitaine 
  • Anny Bourdaleix, Chargée d'études et de formation en Sciences de l'éducation


La recherche a reçu l'appui de Carmen Delavaloire (CEAPSY) et Marjaan Van Opstal (référent-parrain UNAFAM du GEM de Rambouillet). 

1300 personnes ont participé à la recherche "Le pouvoir d'agir des GEM", via un questionnaire national et des focus groupes organisés sur 3 territoires. Au delà de cette participation, le pilotage de la recherche par le CNIGEM a permis le développement d'une recherche ancrée dans les besoins et réalités de terrain. 

La dynamique participative engagée dans le cadre de la recherche a donné lieu à la création de la Communauté Mixte de Recherche en Santé mentale - Bretagne.

Plusieurs actions de plaidoyer ont également été engagées ainsi que des actions de formation auprès des l'ensemble des GEM sur le territoire national. 

 

ALLER PLUS LOIN

Cette page a été réalisée dans le cadre du Programme "Clap sur la recherche", coordonné par la FIRAH. 

Le Programme "Clap sur la recherche" est soutenu par la CNSA :