Intérêt de la musicothérapie sur l’humeur et l’anxiété–dépression : étude observationnelle chez des patients cérébrolésés traumatiques institutionnalisés

Titre traduit

The effect of music therapy on mood and anxiety–depression: An observational study in institutionalised patients with traumatic brain injury

Auteur(s)

  • S. Guétin
  • B. Soua
  • G. Voiriot
  • M.-C. Picot
  • C. Hérisson

Référence

Guétin, S., Soua, B., Voiriot, G., Picot, M.-C., & Hérisson, C. (2009). Intérêt de la musicothérapie sur l'humeur et l'anxiété-dépression étude observationnelle chez des patients cérébrolésés traumatiques institutionnalisés. Annales de Réadaptation et de Médecine physique, 52, 30-40.

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Résumé de l'auteur

Introduction
A previous study (carried out in 2003–2004) had included 34 patients with traumatic brain injury in order to study the feasibility and usefulness of music therapy in patients with this type of injury.
 
Objective
To evaluate the effect of music therapy on mood, anxiety and depression in institutionalised patients with traumatic brain injury.
 
Study methodology
A prospective, observational study.
 
Materials and methods
Thirteen patients with traumatic brain injury were included in the present study and took part in individual, weekly, 1-hour music therapy sessions over a period of 20 weeks. Each session was divided into two 30-minute periods – one devoted to listening to music (receptive music therapy) and the other to playing an instrument (active music therapy). The assessment criteria (measured at weeks 1, 5, 10, 15 and 20) were mood (on the face scale) and anxiety–depression (on the Hospital Anxiety and Depression [HAD] Scale). Mood was assessed immediately before and after the first music therapy session and every fifth session.
 
Results
Music therapy enabled a significant improvement in mood, from the first session onwards. This short-term effect was confirmed by the immediate changes in the scores after music therapy sessions (from 4.6±3.2 to 2.6±2; p <0.01). Music therapy also led to a significant reduction in anxiety–depression (p <0.05) from week 10 onwards and up until the end of the study (week 20).
 
Conclusion
These results confirm the usefulness of music therapy in the treatment of anxiety–depression and mood in patients with traumatic brain injury. Music therapy could usefully form an integral part of the management programme for these patients.
 
Traduction du résumé en français : 

Objectif : Evaluer l'intérêt de la musicothérapie sur l'humeur et l'anxiété-dépression dans la prise en charge des patients cérébrolésés traumatiques (Glasgow Coma Scale de 3 et 4) institutionnalisés en foyer d'accueil médicalisé. Matériels et méthodes : Etude prospective observationnelle sur 13 patients cérébrolésés. Les patients étaient suivis pour une période de 20 semaines et participaient une fois par semaine à une séance individuelle de musicothérapie d'une heure. La séance était partagée en deux périodes de 30 minutes à savoir une partie consacrée à l'écoute musicale (musicothérapie réceptive: méthode validée en U) et une partie à la pratique instrumentale (musicothérapie active). Les critères de jugement, mesurés à S1, S5, S10, S15 et S20, étaient l'humeur (échelle à visages) et l'anxiété-dépression (Hospital Anxiety and Depression (HAD) Scale). L'humeur était évaluée juste avant et après les séances de musicothérapie.
 
Résultats : La musicothérapie s'est accompagnée d'une amélioration significative de l'état d'humeur dès la première séance. L'effet à court terme a été confirmé par les résultats apportés juste après les séances de musicothérapie (4,6 (+ou - 3,2) à 2,6 (+ ou - 2) ; p<0.001). La musicothérapie permettait de réduire de façon significative l'anxiété dépression (p<0.05) à partir de S10 jusqu'à S20.
 
Conclusion : Ces résultats confirment l'intérêt de la musicothérapie dans la prise en charge de l'anxiété-dépression et sur l'état d'humeur des patients traumatisés-crâniens. La musicothérapie peut être une démarche s'intégrant parfaitement dans la prise en charge des patients. Une étude contrôlée, randomisée est possible et doit être promue pour confirmer l'impact de la musicothérapie sur l'humeur et éventuellement sur la consommation d'antidépresseurs chez les patients traités.

Commentaire du Centre Ressources

Une version française de la recherche se trouve à partir de la page 35.
L’étude porte sur 13 patients (2 hommes et 11 femmes) de 31 ans en moyenne avec une ancienneté des troubles de 8 ans. Elle démontre la faisabilité et l'efficacité de la musicothérapie à court terme chez des patients cérébrolésés traumatiques. Elle procure des données importantes qui pourraient être enrichie par une étude contrôlée, randomisée, évaluant l'intérêt de la musicothérapie comme arme thérapeutique, dénuée d'effets secondaires et venant améliorer la qualité de vie de ces patients.
Parmi les mécanismes impliqués dans les interactions de la musique avec le sujet, il semble y avoir des effets sensoriels, affectifs, cognitifs et comportementaux. La musicothérapie réceptive améliore, en effet, de façon sensible le vécu douloureux par des effets neurophysiologiques agissant sur les composantes sensorielles, cognitives (en éloignant l'attention des pensées de la douleur), affectives (modifiant l'humeur associée à des états de dépression ou d'anxiété) et comportementales (agissant sur l'hypertonie musculaire et la psychomotricité). Des facteurs psychologiques peuvent aussi intervenir dans la réduction des manifestations affectives : la musique est choisie en fonction des goûts personnels du patient, permettant par-là de répondre au besoin d'écoute individuelle.
De nombreuses études s’intéressent actuellement à la musicothérapie pour les patients en état végétatif, mais elles se préoccupent surtout de différencier les états végétatifs des états paucirelationnels (cf. par ex. Lichtensztejn  & al., 2014). Dans une perspective thérapeutique, cette étude apporte des éléments importants pour envisager ce type de thérapie dans une visée d’amélioration de la qualité de vie de ces patients.
 
Limites
Les 13 patients testés ici bénéficiaient tous d’un programme de prise en charge pluridisciplinaire associant des exercices physiques, de la kinésithérapie, de l'ergothérapie, de la relaxation, de la sophrologie, des stimulations sensorielles et un entrainement cognitif, à raison d'une moyenne de 6 heures par jour. Il nous semble difficile d’isoler la musicothérapie comme variable responsable à elle seule de l’amélioration de l’humeur et de l’anxiété des patients. Il nous parait donc pertinent de relativiser les résultats de l’étude dans ce contexte de prise en charge pluridisciplinaire.
Cette technique peut nécessiter un nombre élevé de séances (ici une fois par semaine pendant 20 semaines). Il serait donc intéressant de pouvoir évaluer les gains obtenus au-delà de l’humeur et de la détente au niveau de la qualité de vie des patients.Enfin, une population de 13 patients rend difficile la généralisation des résultats et d’autres tests sont donc attendus sur la population française de patients cérébrolésés.